Cyberspace Odyssey -Towards a Virtual Ontology and Anthropology

51rzmbKtddLRemontons donc en arrière, l’émergence des hominidés date d’il y a plus de cinq millions d’années. Grâce à l’évolution de la technologie et de l’informatique, un nouveau domaine de l’expérience humaine et de l’imagination a été divulgué. La post géographie et posthistoire ont commencé à coloniser nos corps et nos esprits. L’auteur Jos de Mul, professeur titulaire d’anthropologie philosophique à l’Université Erasmus de Rotterdam, questionne notre culture, art, religion, et science. Notamment, les rôles de la causalité et des interdépendances entre le réel, le virtuel et l’hybride qui façonnent notre forme de vie. De toute évidence, Jos de Mul met l’accent sur trois questions fondamentales: Qu’est-ce que le cyberespace? Comment cet espace et temps particuliers affectent notre monde et notre propre compréhension? Dans quelle mesure Odyssée peut changer notre monde et nous même en traversant le cyberespace? Avec ces questions, je commence l’exploration fascinante du cyberespace et cybertime avec Odyssée.

Le cyberspace, qu’est-ce exactement? Selon l’introduction du livre, le cyberespace est un élargissement de l’espace et du temps. On peut dire qu’il est un espace post géographique et un temps post-historique. Cependant, Mul croit que la meilleure façon pour discuter du cyberespace est la métaphore: comparer les choses connues et inconnues. L’autoroute électronique (electronic superhighway) est un bon exemple de la métaphore. En plus, au début du livre, il raconte l’histoire d’Odyssée qui erre sur la mer pendant une dizaine d’années. Dans de nombreuses façons, Odyssée et son destin représente le destin de l’humanité en général. Il me semble nécessaire de mentionner le film de Kubrick « 2001, l’Odyssée de l’espace », il parle d’un monolithe noir ayant une grande influence sur l’évolution humaine. En bref, l’ordinateur omniprésent amène l’humanité dans le cyberespace.

En premier lieu, l’auteur nous aide à comprendre le terme cyberespace. Usuellement, l’espace signifie « un écart entre les choses ». Bien sûr, en dehors de l’espace géographique l’espace est également une possibilité discrétionnaire afin d’atteindre nos objectifs. En outre, l’auteur cite beaucoup de définitions de l’espace des autres penseurs tels que Giordano Bruno, Isaac Newton, Kant, Gottfried Wilhelm Leibniz… Parmis eux, je trouve celle d’Heidegger intéressante. Il pense que l’espace n’est pas objectif ni subjectif, mais il apparait dans le mouvement de notre existence dans le monde. Par rapport à la notion du temps, il tient à dire que le temps est la quatrième dimension qui se superpose sur la troisième dimension, l’espace. L’espace possède la dimension de temps, il s’apprécie à travers le temps.

L’autoroute vers l’avenir

Prenons l’article « Le Manifeste du futurisme », publié le 20 février 1909 dans Le Figaro. Celui-ci a été écrit par Filippo Tommaso Marinetti, l’un des acteurs les plus importants du Futurisme. L’auteur y résume les prévisions des futurologues: L’avenir est étroitement lié à nos actions d’aujourd’hui. Le futur, dans l’imagination humaine, est inspiré du présent. Et en analysant l’histoire de la peinture, la musique et la littérature, etc. Jos mul soulève une Renaissance nouvelle, numérique et spirituelle. L’avènement de la technologie et l’informatique nous pousse vers l’espace virtuel. Cependant, l’expansion de cette colonisation humaine a un coût très important. Alors, l’auteur pense qu’il est préférable de considérer que le cyberespace est une machine qui nous permet de créer un nouveau monde possible. Mais, Albert Arnold a mentionné que de plus en plus de politiciens commencent à se rendre compte que la technologie et l’informatique ont un impact considérable sur la société et la politique. Par conséquent, cet outil technologique, neutre au départ,  finit par prendre une dimension sociale et politique primordiale, comme l’invention de la machine à vapeur en son temps, emmena l’être humain dans une révolution industrielle puis informatique comme nous la connaissons aujourd’hui.

Chaque jour, l’humain est noyé dans un flux considérable d’informations. Et les informations sur « l’autoroute électronique » sont encore plus diversifiées et complexes. L’auteur cite le plus célèbre roman : 1984 (Nineteen Eighty-Four), de George Orwell, pour démontrer la puissance de Big Brother dans le cyberespace. Dans ce livre, le cyberespace est un espace hiérarchisé dont Big Brother prend le contrôle pour ainsi obtenir le pouvoir absolu. Il en avait conclu que le cyberespace non seulement élargit l’espace des dirigeants et des institutions sociales, mais agrandit aussi l’espace du citadin et du béhavioriste. Mais le grand regret de ces citadins idéalistes du cyberespace est que la société n’y est pas personnalisable, révélant ainsi la face réelle du cyberespace, peu distincte, somme tout, du monde réel.

L’imagination du cyberespace

Le « Cyberpunk » nous annonçait que le monde virtuel est très proche de nous. Les romans sur les thèmes électronique et numérique nous ont indiqué que l’ère de la littérature cyberespace est arrivée. L’auteur mentionne trois mondes philosophiques. Les histoires similaires à celle d’Odyssey seraient une exploration du premier monde (monde objectif, matériel et ses propriétés physiques); La littérature moderne se concentre sur le développement sensoriel et psychologique des personnages. Cela est considéré comme l’explicitation pour le deuxième monde (le monde de la conscience humaine, la pensée, la motivation, le désir, l’émotion, la mémoire, la fantaisie, etc). Cependant, avec l’arrivée de la littérature cyberpunk, le cœur des découvertes repose désormais sur l’expansion illimitée, «l’esprit objectif» et «non-espace». Cette prospection de l’espace virtuel explore le troisième monde (le monde de la culture, constitué par le produit intellectuel humain, tel que la langue, l’éthique, le droit, la religion, la philosophie, la science, l’art et les institutions sociales, etc).

Le cyberspace numérisé affecte non seulement la littérature, mais aussi le jeu et le film, comme The Mist, qui exprime qu’on peut sans cesse parcourir l’espace, mais sans arriver nulle part. L’imprévisibilité et la fluidité sont l’enchantement et la fascination du monde virtuel.

De nos jours, la technologie et l’informatique s’étendent progressivement aux domaines du cinéma, de la littérature et des autres formes de l’art. La numérisation est divisé en deux types: l’un est la révolution informatique, qui provoque des impacts importantes sur la production, la circulation et la consommation de l’art; L’autre est l’ordinateur, qui s’écarte de l’art traditionnel. Alors, la controverse est soulevé par l’art traditionnel lui-même. En outre, selon l’avis de l’auteur, l’art numérique comporte trois caractéristiques: la multimédiatisation, l’interactivité et la virtualisation.

La possibilité du cyberespace

De toute évidence, la technologie et l’informatique ont changé le monde, même modifié progressivement notre vision du monde. L’histoire humaine est entrée dans l’ère de l’informatique. L’ordinateur et internet représentent la science et la technologie. De telle sorte que la production et la vie humaine ont rencontré un bouleversement sans précédent. Elles se diffusent largement à travers le monde et y exercent une influence profonde, surpassant par sa portée toute révolution technologique précédente de l’histoire de la civilisation humaine. On appelle ce phénomène « conception du monde informatisé ». L’auteur nous raconte ses trois significations: d’abord, le monde matériel comme machine de traitement de l’information; Deuxièmement, la science et l’informatique étudient les algorithmes mathématiques cachés derrière les expériences sensorielles; Troisièmement, toute chose serait régie par un langage mathématique. Dans le même ordre d’idée, Brunschvicg déclarait que le monde est un réseau d’équations et de fonctions. En somme la réalité est mathématique et il n’existe pas d’autre réel que les mathématiques. Alors, la réalisation du cyberespace a de grandes chances de réussite.

Comment l’espace virtuel émerge?  Les fonctions du cyberespace lui permettent de s’exposer aisément au monde. Grâce à l’imagerie numérique, on a inventé l’appareil photo numérique, le logiciel PhotoShop, etc. La photographie est désormais transformée en médias numériques. Sigmund Freud a dit  » la modernité a mis un miroir devant le monde et l’a transformé en image « . Grâce à son exposition et les liens qu’elle entretien avec le reste du monde, le cyberespace n’est plus virtuel, mais devient réel. Comme Heidegger, qui élève la possibilité de pouvoir-être au-dessus de la réalité. »

Cyborg

Avec l’avènement de l’ère informatique, nous sommes confrontés à plusieurs problèmes, dont l’identité. Le terme identité se réfère à l’unité et la personnalité. Les Méditations Métaphysiques de Descartes proposent quatre caractéristiques de la notion d’identité humaine: D’abord, l’identité humaine a un lien spécial avec l’âme rationnelle.  Deuxièmement, l’humain est conçu comme un thème isolé, qui est opposé au monde, aux autres; Troisièmement, les individus sont considérés comme une essence éternelle; Quatrièmement, il estime que l’identité humaine est une substance. Certains pensent qu’aucune identité physique n’est un problème dans le cyberespace. Par conséquent, il faut établir l’identité dans tous les médias. L’anthropologie numérique dans le nouveau terrain – cyberespace est le champ original qui est à la croisée des domaines de l’anthropologie et de la technologie. Des recherches sont encore en cours.

A travers la porte intersidérale

« L’évolution » de Darwin nous raconte le processus évolutif du singe à l’homme. Puis, concernant l’apparition du cyberespace, les darwinistes estiment qu’il est le processus de l’évolution de l’Homo erectus à l’humain intelligent. Les deux applications: « Agents intelligents » et « systèmes experts »  incarnent pleinement l’intelligence du cyberespace;  Le World Wide Web en tant que super-cerveau influence fortement nos vies avec ses capacités « super-intelligent ».

Le transhumanisme voulait créer des humains augmentés, la technologie du génie génétique, de l’intelligence artificielle et la vie artificielle peuvent être considérées comme le majeur de la transformation évolutive prochaine. Toutefois, les conceptions telles que celui-ci forme l’affrontement entre le transhumanisme et l’humanisme. C’est un défi lancé à humanisme. Ou bien le transhumanisme est en fait l’humanisme. Dans les prochaines décennies, ce sujet soulevera de nombreuses questions.

Enfin, le cyberespace est réel et à la fois virtuel, il est comme « Wormhole », qui nous permet d’aller du point A au point B en un clin d’œil, ou d’aller dans un monde parallèle. Nous interagissons avec le cyberespace à tout moment. Celui-ci va-t-il provoquer une fracture entre le monde réel et le monde virtuel? Ou bien son existence est- il un miroir et l’extension du monde réel? Peut-être que dans le future, il deviendra un monde indépendant, qui établira ses propres lois et règles. A la fin, Jos mul nous dit: Tout est possible et les possibilités sont infinies. Nous pouvons suivre Odyssée et entrer dans le cyberespace par la porte interstellaire!

Mille Plateaux – Gilles Deleuze et Felix Guattari

71-c1B7U3iLQuand je me suis penché sur la question du cyberespace, je suis parti de notions longuement élaborées par Deleuze et Guattari, la notion de racine unique, de rhizome, de ligne de fuite, l’espace lisse et l’espace strié.

Le livre « Mille Plateaux, Capitalisme et Schizophrénie 2 » est le deuxième ouvrage, après « L’Anti-Oedipe », qui sont assemblés sous le titre générique de « Capitalisme et schizophrénie ». Mille Plateaux est considéré comme un ouvrage qui explore des chemins inédits des champs politique et philosophique, une ontologie révolutionnaire des devenirs s’attaquant aux concepts afférents à l’arborescence, d’Etat, de langue et de nomade.

Leur conception originale du pluralisme et du rhizome est incontestablement l’oeuvre la plus importante de Deleuze et Guattari. L’individu est au milieu et non le fondement ou l’unicité de l’organisation sociale. L’idée principale que l’on retrouve à travers l’ensemble de l’ouvrage de Milles Plateaux est que l’individu est un multiple, une pluralité. Les subjectivités sociales sont toujours au-dessus ou en dessous de l’individu. Dans ce livre, L’idée des plateaux montre au gens une subjectivité sociale toujours en mouvement, comme la racine d’un rhizome, sans commencement ni fin. Nous avons une horizontalité fluide opposée à des concepts tels que  » L’individu comme racine et fondement « , longtemps implanté dans la philosophie du monde moderne occidental. On peut voir un grand nombre de philosophes tels que Platon, Kant, Hegel…qui explicitent leurs doctrines par l’arborescence.

L’introduction de ce livre, «Rhizome» avait été écrite en 1976 et reprise ensuite dans «Mille Plateaux» en 1980. Mille plateaux est considéré comme un livre-carte, un livre-rhizome qui n’a pas de début ni fin, ou d’ordre pré-établi. Il est formé de chapitres (plateaux). On peut commencer la lecture par n’importe quel chapitre car il n’y a pas de hiérarchie. Il n’est organisé ni catalogué chronologique, comme les livres arborescents. Il est plutôt comme une carte, on peut prendre n’importe quel chemin, et y entrer à n’importe quelle ligne pour aller à n’importe quel endroit. Prendre les lignes de fuite, se déplacer à travers ses plateaux, effectuer la déterritorialisation et la reterritorialisation.

Dans le chapitre Rhizome, on peut comprendre que la pensée du multiple, du fragment et de la transformation. Ces idées ont rapport aux théories qui concernent les systèmes et les réseaux. Par exemple: « le devenir comme un passage, une transition » la définition des flux et des connections horizontales des réseaux qui correspond à la conception organique, qui est fragmentaire et en même temps fluctuante. L’homme a créé beaucoup de systèmes différents. Cependant, internet est très singulier entre eux, car il est un système de type « Rhizome ». Le système d’éducation, de gouvernance ainsi que les autres organisations sont de type arborescent. Dans le cadre d’un système arborescent, on peut voir que toutes les choses sont divisés par des branches qui partent d’un tronc. Il y a une caractéristique hiérarchique très forte dans l’arbre. La hiérarchie est préétablie : la racine, le tronc, le branche, et puis le feuille. Le rhizome est radicalement différent, il n’a de centre, comme les herbes sauvages qui s’étendent sans limite sur la terre, il n’a pas de division, un point du rhizome est connecté avec tous les autres points, sans ordre fixe.

Les racines rhizomes et les racines arbres sont des fragments des éléments de plateaux. Le rhizome est une plante vivace et une extension biologique. Il n’a pas d’intention de s’incruster profondément dans la terre, il ne possède pas un caractère de verticalité, il est composé de lignes qui s’étendent horizontalement et dimensionnellement comme la racine prolifique des bambous, asperges, gingembres, pommes de terre, mais aussi les réseaux sociaux, les blogs, les fourmis (la fourmi est un rhizome animal dans la nature, c’est pourquoi on trouve que il est si difficile de se débarrasser des fourmis. Souvent, après un grand désastre, les fourmis peuvent se réunir et reconstruire une colonie entière) ; chaque segment est indépendant et possède sa propre vie, mais il influence les autres. Au fond, le rhizome a multiplicités linéaires (à entrées et sorties multiples avec ses lignes de fuites) à n dimensions et s’inscrit dans l’immanence. Il n’y a pas une, deux, cinq ou dix subdivisions. La limite du rhizome est insaisissable. « Le rhizome est une antigénéalogie. C’est une mémoire courte, ou une antimémoire. Le rhizome procède par variation, expansion, conquête, capture, piqûre. A l’opposé du graphisme, du dessin ou de la photo, à l’opposé des calques, le rhizome se rapporte à une carte qui doit être produite, construite, toujours démontable, connectable, renversable, modifiable, à entrées et sorties multiples, avec ses lignes de fuite.  » (Gille Deleuze et Félix Guattari, Rhizome Ed. de Minuit, 1958). Les autres s’enracinent dans la transcendance, ils sont conventionnels, statiques, pétrifiés, liaisons préétablies. Pourtant, les deux systèmes sont indispensables pour les plateaux, il n’y a pas soit des rhizomes soit des arbres. Pour qu’il y ait des rhizomes il faut qu’il y ait des arbres, parfois les rhizomes deviennent racines puis arbres, parfois c’est l’inverse.

Les auteurs pensent que le rhizome est la mémoire courte et l’arborescence est la mémoire longue. On peut étendre cette idée à l’informatique. L’internet d’aujourd’hui est un jeune cyberespace, il est rhizome. Au contraire les ordinateurs sont arborescents. Le cyberespace est comme une mémoire courte de l’humanité, perpétuellement en mouvement. Quand on est sur internet, les hyper-liens nous amènent aux endroits inconnus. On part d’un point à un autre, on zappe les informations fragmentaires en oubliant son point de départ. Le point de départ n’est plus et ne sera jamais  » Le Point de Départ  » (juste un point départ entre un nombre infini de point départ). C’est comme le désert du Sahara, il n’y a pas un chemin défini, un point de départ fixé. Mais il existe bien une myriade de chemins. En plus on peut effacer le chemin et rechercher un autre chemin. Aucun chemin n’est abouti. L’horizon, lui aussi, est infini. D’ailleurs, selon l’image de structure du cerveau humain, le rhizome internet est similaire à celui-ci et à la composition de la connexion entre les neurones. Dans ce livre, les auteurs ont écrit « La pensée n’est pas arborescente, et le cerveau n’est pas une matière enracinée ni ramifiée. », la pensée est rhizome.

Les caractéristiques du rhizome : sans hiérarchie, acentré (polycentré), insaisissable, Lorsqu’il est cassé, il va se reconstruire. Il peut être interprété comme une manière de concevoir un système de connexion libre entre les choses anti-générique dans le cyberespace. Une fois les ordinateurs connectés au réseau, les circuits informatiques peuvent se présenter sous diverses formes : un son, une vidéo, du texte, etc. Les utilisateurs font la carte rhizome avec tous les éléments informatiques différents. Il faut mentionner le fameux exemple de la guêpe et l’orchidée « L’orchidée se déterritorialise en formant une image, un calque de guêpe ; mais la guêpe se reterritorialise sur cette image. La guêpe se déterritorialise pourtant, devenant elle-même une pièce dans l’appareil de reproduction de l’orchidée ; mais elle reterritorialise l’orchidée, en en transportant le pollen. La guêpe et l’orchidée font rhizome, en tant qu’hétérogènes « . Par rapport à la guêpe, on voit pas comment l’orchidée germe, fleurit et pousse. Ainsi, on ne perçoit pas la généalogie de la guêpe à travers l’image de l’orchidée. Pourtant, ils font la carte rhizome ensemble. En plus l’orchidée peut aussi faire rhizome avec les autres insectes ou animaux. La guêpe peut également se déterritorialiser avec les autres fleurs.

Les idées de « Mille plateaux » sont typiquement importantes pour caractériser le cyberespace, un terme inventé par William Gibson dans une nouvelle《 Burning Chrome 》publiée dans le magazine 《omni》en 1982. Ensuite, le cyberespace est popularisé dans le roman de science-fiction Neuromancien qui est publié en 1984. Il est souvent considéré comme le roman fondateur du mouvement Cyberpunk, et a inspiré un grand nombre d’œuvres telles que les mangas Ghost in the Shell ou Akira et Matrix au cinéma. En fait, le titre original de ce roman est Neuromancer, neuro signifie le nerf, l’intelligence (artificielle) et mancien signifie prédire l’avenir, par extension : la magie. Ce phénomène était engendré dès lors que l’on aperçoit que le développement informatique et technologique crée un haut degré de civilisation matérielle, mais alimente également la crise écologique mondiale. Le développement durable de l’humanité est menacée, nous imposant impérativement un nouvel espace de vie, qui est au-delà de la réalité, de la présence tangible et du temps et l’espace.

Le cyberespace a beau être une nouvelle dimension de l’espace géographique et du temps historique, imperceptible au premier abord, il n’en demeure pas moins présent dans presque chacun des aspects de nos vies quotidiennes. Cela revient à dire qu’il n’y a pas seulement une partie du monde humain qui déplacé vers le monde virtuel, mais notre monde d’origine est entremêlé avec l’espace et le temps virtuels. Autrement dit, nous n’avons pas toujours conscience de notre déplacement vers le cyberespace. Le cyberespace est en train de coloniser notre monde dans le silence.

Dans « Deleuze Dictionnaire » (2005), dans la partie «Espace et Arts numériques», nous retrouvons une discussion sur la relation entre la philosophie, l’esthétique et l’art numérique de Deleuze. Les sujets sont les suivants : l’espace ouvert, l’espace lisse, l’absence de limite, la vitesse, le sexe ou la race ambiguë, les connections rhizome et la création hybride… toutes les idées de Deleuze ont hanté certains artistes, c’est sans doutes pourquoi il est ensuite devenu un favori parmis les artistes numériques. Deleuze s’interroge sur les concepts traditionnels de l’espace culturel : l’espace serait une toile de fond, l’humain jouerait un rôle principal dans la pièce de spectacle. Lorsque le concept de rhizome remplace la pensée dendroïde, l’espace n’est plus séparé de l’acteur humain. L’espace possède une portée virtuelle, vit dans le rhizome. La pensée rhizome peut entrer dans l’espace virtuel de l’ordinateur et de l’art numérique. Il efface les limites, détruit le dualisme : nature et humain, humain et machine, humain et animal ou humain et Cyberg, créant un nouvel espace. Les artistes numériques créent des nouveaux corps, hybrides, sur internet, ils s’interrogent sur les limites existantes pour les déverrouiller. Ils peuvent ouvrir un nouvel espace virtuel et commencer une création illimitée. Cependant, l’ordinateur et Internet sont désormais parties de la malédiction du capitalisme, il construit des barrières et contrôle leurs mouvements par l’informatique, afin d’éviter qu’ils s’écartent de l’orbite qu’on leur impose, de se dévier de leurs objectifs, dans un but de consolidation de la société. L’espace est ainsi en train de perdre sa qualité virtuelle. Néanmoins l’art a le potentiel pour se détourner du champ économique capitaliste. L’art numérique permet aux gens de s’expérimenter dans un espace virtuel, en perpétuel changements, sans frontière, de créer et recréer un nouvel espace virtuel.

On trouve la même idée qui s’oppose au contrôle du cyberespace par les gouvernements (ou d’autres formes de pouvoirs) dans « La Déclaration d’indépendance du cyberespace », un document rédigé le 8 février 1996 à Davos en Suisse par un des fondateurs de l’Electronic Frontier Foundation John Perry Barlow. La Déclaration refuse l’appropriation d’internet par un gouvernement extérieur. Car il pense qu’aucun état n’a eu le « consentement des gouvernés » pour appliquer leurs lois sur Internet, et qu’internet n’appartient à n’importe quel pays. En plus, internet se régule par lui-même, avec ses propres codes et langages sociaux, basé sur l’éthique de réciprocité. Cette déclaration n’accuse pas seulement Les États-Unis, mais également la Chine, l’Allemagne, la France, la Russie, Singapour, et l’Italie d’asphyxier l’Internet.

« Governments derive their just powers from the consent of the governed. You have neither solicited nor received ours. We did not invite you. You do not know us, nor do you know our world. Cyberspace does not lie within your borders. Do not think that you can build it, as though it were a public construction project. You cannot. It is an act of nature and it grows itself through our collective actions. »

« Cyberspace consists of transactions, relationships, and thought itself, arrayed like a standing wave in the web of our communications. Ours is a world that is both everywhere and nowhere, but it is not where bodies live. » – Extrait de « La Déclaration d’indépendance du cyberespace ».

Aujourd’hui, le Cyberespace est omniprésent. Il contient tous les médias nouveaux et hétérogènes. Comme dans une chambre : il y’a le bureau, le lit, les fleurs, les rideaux, des tasses, des lampes etc. Il est également un nouveau monde, primordial, étroitement lié à la société et la culture; un espace lisse ouvert par les médias numériques. Mais il cohabite avec l’espace strié, la reterritorialisation. Dans une certaine mesure, tous les types de portails webs, comme les jeux en ligne, tchats, pages web personnelles, blogs, etc. sont des construction de leur propre domaine. Cependant, le lien hypertexte permet à tous les médias numériques de se synchroniser. Le multimédia, le lien hypertexte, la virtualité, l’interactivité, déterritorialisent les espaces striés à tout instant, afin de créer les nouveaux espaces lisses ouverts et l’espace nomade. Tout comme « l’éternel retour » De Nietzsche. Mais, Nietzsche parle du temps, et Deleuze se focalise sur l’espace. La réconciliation entre l’espace lisse et la déterritorialisation du cyberespace porte l’esthétique de nomade.

Selon Mille plateaux l’espace lisse est insaisissable, il est une globalité étendue. Comme le cyberespace, le désert du Sahara, la Grande Prairie ou l’océan Pacifique. Là-bas, le nomade y déambule à son gré. On évolue selon ses nécessités ou son propre désir, les parcours sont plus conjoncturel. L’aboutissement de l’espace est incertain. Il existe bien des routes (comme les hyperliens), mais elles ne sont pas toutes marquées par des repères bien précis et des trajets définis. Pas de limites, par rapport au regard de l’homme, l’horizon est aussi illimité. Cet espace est absolument ouvert et déterritorialisé. On s’y sent libre car on y est libre. On y effectue les échanges inter culturels ou marchands les plus fructueux. Là-bas on voit la soie chinoise qui traverse la rivière, la montagne, le désert, la croisade par voie maritime, les tribus Mongoles galopant sur la prairie, et quand on est devant l’ordinateur, en fait, l’écran n’existe pas vraiment, on pourrait dire qu’il est comme une paire de lunettes. En les mettant, on voit le monde varié mais pas les lunettes.

L’espace strié est le contraire de l’espace lisse, il est fermé, jalonné, normalisé, légiféré, géo référencé et territorialisé. On peut interpréter qu’il est celui des campagnes, des champs bocagers, borné et emplit de routes, de chemins et de couloirs. Lorsque l’on prend un chemin de départ, la fin nous attend sûrement. L’itinéraire est pré établi: d’un point A à un point B.

Félix Guattari et Gilles Deleuze pensent qu’il y a trois types de lignes qui existent au sein de nos vies : la ligne dure, la ligne souple et la ligne de fuite. Les lignes dures sont présentées par des systèmes de pouvoir. Nous devons rester sous contrôle par le destin fixé ou les itinéraires fixés. Comme aller à l’école quand on est enfant, puis à l’université, aller chercher un travail et enfin prendre sa retraite. Les lignes dures ont l’air plus rassurantes, conviennent aux gens qui ne veulent pas prendre de risques, ou de se lancer dans l’aventure. Elles nous promettent un « avenir » confortable dans notre imaginaire: un métier, une famille, un fatum à achever, une mission à remplir.

Les lignes souples sont différentes mais circulent autour des lignes dures. Elles jouent un rôle supplémentaire, telle que les histoires de famille, les petits secrets, les discussions à voix basses pendant les cours, la micro-politique à l’école. Au fond, ce sont des élément qui s’immiscent dans les routines de la vie : les refus de respecter le code de la route, les oppositions aux idées politiques dans une société fermée, les manifestations ponctuelles, les cours séchés. Si on prend une ligne souple, on retourne rapidement sur la ligne dure et tout rentre dans l’ordre.

Et enfin il y a les lignes de fuite, Elles ne nous amènent jamais au même endroit. C’est-à-dire que si on prend une ligne de fuite, on ne peut jamais revenir en arrière. C’est un risque absolu que l’on prend. Deleuze et Guattari citent Fitzgerald dans Mille Plateaux  » Une vraie rupture est quelque chose sur quoi on ne peut pas revenir, qui est irrémissible parce qu’elle fait que le passé a cessé d’exister « . On comprend que les lignes de fuites n’amènent pas à un avenir mais un devenir. L’ordre,  le calendrier, le programme n’existent pas sur une ligne de fuite.  » Plus personne ne peut rien pour moi ni contre moi. Mes territoires sont hors de prise, et pas parce qu’ils sont imaginaires, au contraire, parce que je suis en train de les tracer  » – (Mille Plateaux).  » Nous devons inventer nos lignes de fuite si nous en sommes capables, et nous ne pouvons les inventer qu’en les traçant effectivement, dans la vie « – (Mille Plateaux). La direction est mystérieuse et imprévue. Un devenir suggère un processus hors de contrôle. C’est la ligne qui nous promet une émancipation, délivrance et libération. Au contraire du destin fixé, préétabli, il y a cette ligne, qui nous permet de sentir l’être en nous, de se sentir débarrassé du joug.

D’après la théorie des trois lignes, il n’y a plus de dualisme. Car les lignes dures ne représentent pas les mauvaises. Au contraire, les lignes de fuites ne présentent pas non plus les bonnes lignes. Le dualisme apparait pour la première fois dans la philosophie occidentale avec les écrits de Platon et Aristote. C’est une pensée de la morale et un dispositif du pouvoir. La bonne voie n’est pas forcement de prendre les lignes de fuites. Elles nous donnent notamment une occasion d’expérimenter et découvrir. Les lignes dures sont pour nous capitales, parce qu’elles nous donnent la nourriture et un endroit pour se loger. Même si elles manipulent nos manières de penser, de se comporter et de sentir. Elles visent à dévaster les lignes de fuites afin de manifester contre l’Etat et aussi contre soi-même.

Pourtant, les lignes de fuite sont les plus aventureuses et réelles par rapport aux lignes souples, car elles sont imaginaires : rêveries, illusions, utopies, bavardages…).nous devons tracer nous-mêmes nos lignes de fuite. La fuite peut nous emmener dans un trou noir, la prison et la mort. On a effectivement fui nos lignes dures. Mais la fugue est une expérimentation scabreuse. C’est comme lorsque parfois, pour s’amuser, on clique sur une petite publicité d’un site fade pour prendre une ligne de fuite, mais cela transmet le virus. Continuer à développer l’intelligence artificielle est une ligne de fuite, charger la conscience sur internet aussi.

Enfin, dans nos vies, toutes les lignes sont entrelacées. A la multitude des systèmes pré établis, de pouvoirs et de conventions (les lignes dures) se tortillent une myriade de lignes souples. On vit dans une structure fixée, mais chaque point a une multiplicité de désertions possibles. On peut tracer sa ligne de fuite et expérimenter la vie de soi. En plus je trouve que le rhizome me fait penser à la relation entre l’humain, l’animal, la plante et le monde inorganique. L’humain n’est pas le centre du monde. Tous les éléments constituant le monde sont une partie du rhizome; Il ne doit pas y avoir de conflit, de domination entre l’humain et la nature, mais une connexion, une interdépendance. Un lien est établi pour former une carte de rhizome. Le cyberespace serait alors un espace sans matière, un organe, un prolongement et un miroir de notre monde, un développement de notre conscience, qui est fluctuante et qui s’étend comme le rhizome dans toutes les directions, ou dans aucune. Notre conscience s’alimenterait des autres consciences, et les internautes de nos jours seraient alors rhizomes eux-mêmes.

« Une machine pour voir avec », un jeu en réalités alternées proposé par Blast Theory

Blast Theory est un collectif d’artistes britanniques internationalement reconnu. Étant à la base une compagnie de théâtre, ses artistes, Matt Adams, Ju Row Farr et Nick Tandavanitj, se sont orientés vers l’utilisation de médias interactifs. Ils créent alors des nouvelles formes de représentation de l’art interactif en mixant l’approche d’internet, la performance, et la radiodiffusion numérique. Le groupe travaille et explore les aspects sociaux et politiques de la technologie. Blast Theory interroge souvent aussi les frontières entre réalité et fiction, en se basant sur des jeux et la culture populaire de manière générale.

«Vous êtes dans un film, et c’est vous qui jouez le rôle principal » dit la voix au bout du téléphone.

urlBlast Theory, A Machine To See With, 2010

A Machine To See With est une œuvre de fiction interactive et cinématographique qui interroge et brouille les frontières entre réalité et imagination. Les artistes demandent à des participants de s’inscrire en ligne pour cette performance. Ceux-ci reçoivent ensuite un appel automatique leur disant à quel endroit se rendre. Au moment où ils se rendent sur le lieu indiqué, ils s’engagent et reçoivent alors un appel téléphonique sur leur téléphone portable : il s’agit d’une voix qui donne les instructions à suivre.

Ils sont alors happés par les actions à faire. Ils se rendent aussi compte en découvrant d’autres personnes, des complices, pour avancer dans le récit, qu’ils sont alors acteurs d’un film de cambriolage, avec une vraie banque, des vrais policiers, et qu’un crime aurait été commis.

Êtes-vous alors le héros, le personnage principal du film ou tout simplement un pion, un élément d’accessoire pour faire fonctionner le dispositif ? Est-ce Blast Theory qui manipule vos actions ou êtes-vous vraiment libre de vos actes, de vos actions ? Le spectateur n’est plus alors passif, mais acteur et sujet à la fois de sa propre expérience immersive.

Une réelle tension existe avec l’alternance entre réalité et imagination. On peut alors appeler ceci « réalités alternées », jouant constamment entre le jeu et la vie réelle. L’utilisateur ne sachant réellement quoi faire, il suit ce que lui dit la voix au bout de son téléphone. Il est alors libre d’accepter ou pas de continuer à jouer le jeu, comme le dit ce témoignage de Kyle Buchanan : «Tandis que le type aimable pianote sur le clavier du distributeur, la voix me dit de changer de plan. C’est maintenant qu’il faut y aller. J’oublie alors le type sympathique qui envahissait mon espace. «Besoin d’aller quelque part ? » me demande-t-il ? Proposition innocente ou élément du jeu ? Je refuse, tandis que la voix me dit avoir besoin de moi à l’intérieur de la banque dans 10 secondes. Elle débute déjà le décompte l’écouteur pressé contre mon oreille. « 9.., 8..» Est-ce que c’est le moment où je suis supposé flancher ? « 7.., 6.. » Y a-t-il des personnes dans la banque maintenant ? « 5.., 4.. » Je suis déjà là, sur le point d’ouvrir la porte. Je ne suis pas un cambrioleur de banque, même pour jouer, d’accord ? Est-ce que ceux qui me surveillent vont se moquer de moi pour jouer, d’accord ? Est-ce que ceux qui me surveillent vont se moquer de moi si je n’entre pas ? Suis-je l’auteur de ma propre histoire ou bien est-ce Blast Theory, et que vais-je faire ? Dans le but de ne pas me compromettre, ni de gâcher la fin de A Machine To See With, je ne révélerai pas ce qui advient après. »

Cette œuvre s’inscrit dans un contexte de crise financière, où l’argent fait partie de l’élément perturbateur, qui va rendre indécis et perplexes les différents individus qui y participent. En s’établissant dans un environnement réel, l’individu ne va plus savoir si chaque action qu’il émet reste un jeu ou pas. Blast Theory a traité l’espace de la ville comme s’il s’agissait d’un espace cinématographique, où il a conçu nos yeux comme des écrans.

En plus de parler clairement de l’impuissance quotidienne que les citoyens connaissent face au capitalisme en général de nos jours, A Machine To See With critique et interroge la tyrannie de la société de consommation à laquelle on est confronté aujourd’hui. Elle interroge aussi le dispositif technique, et c’est ce qui m’a attirée au premier abord : l’espace immersif utilisé est la ville, une ville bien réelle, avec des éléments concrets, comme une vraie banque, avec des vrais policiers qui sont présents. On ne sait pas alors ce qui relève encore du jeu ou pas, mais ce qui est sûr, c’est qu’à partir du moment où on entre dans cette œuvre, on est tout de suite immergé dans un environnement inquiétant, car complexe, dans le sens où l’humain est livré à l’omniprésence de la machine qui établit des règles du jeu. Une certaine angoisse et inquiétude règnent alors sur le joueur car le dispositif conditionne ses actions et ses choix. Ce mode interactif est de plus en plus présent dans le cinéma aujourd’hui avec l’arrivée du cinéma interactif. Cinéma interactif qui va au fur et à mesure se démocratiser dans nos salles de cinéma. L’implication du spectateur, qui devient un « utilisateur », fait tout le charme de A Machine To See With, qui est une œuvre qui interroge les nouveaux aspects du jeu et de l’art aujourd’hui, dans une situation immersive donnée, relevant d’un univers virtuel.

L’immersion, ou comment le spectateur se retrouve être le sujet et le centre d’intérêt d’un univers virtuel

Bernard Guelton est un chercheur de l’Université de Paris 1 Sorbonne qui étudie les contextes sociaux à travers des réalisations artistiques en lien avec l’architecture urbaine. Les applications mobiles, les jeux urbains, l’intéressent et font partie des problématiques qu’aborde principalement son équipe de recherche, Fictions et interactions. Son but est d’interroger les caractéristiques de la fiction à travers des pratiques artistiques, mais aussi les rapports entre l’architecture et la fiction.

bernardgueltonBernard Guelton, Professeur à l’Université de Sorbonne Paris 1

Il s’agit d’une œuvre collective de différents auteurs, à travers différents aspects des figures immersives actuelles, où Bernard Guelton, et son équipe de chercheurs ont voulu traiter de la problématique de la notion d’immersion dans la création artistique, mais aussi, dans le cadre d’expériences, de dispositifs techniques. Quelle soit fictionnelle, virtuelle, en réalité alternée, l’immersion se présente sous différents aspects très divers. Ce qui est mis en avant, c’est d’interroger la place du spectateur, et plus particulièrement, sa perception, son regard, son corps aussi, face à un environnement qui lui est proposé, face au monde, qui devient virtuel : « De façon moins caricaturale et de façon plus diffuse, le recours de plus en plus prégnant à des outils virtuels dans la vie quotidienne par le plus grand nombre a déplacé la question de l’immersion. Il ne s’agit plus majoritairement d’environnements tridimensionnels recourant à des dispositifs technologiques sophistiqués, mais à des usages informatiques diversifiés, à des applications mobiles brouillant les frontières entre réalité physique et univers virtuels. »

figuresdel'immersion

Cet ouvrage nous donne à voir le paradigme immersif qui a lieu aujourd’hui, à savoir que certains usages informatiques incitent à brouiller les frontières entre réalité et univers virtuel. Avec des applications de téléphone, des jeux en réalités alternées, des œuvres sonores mais aussi des œuvres cartographiques… ces différents usages enrichissent une réflexion qui est axée sur l’approche de l’immersion, et du dispositif par rapport au « spectateur », où chacune de ses actions va altérer le projet, et faire en sorte de « reconfigurer la matérialité physique et perceptive de l’œuvre ». Ainsi, chaque spectateur va adopter une singularité face aux diverses expériences qui lui sont proposées, car celles-ci vont lui donner à voir de nombreux points de vue singuliers, ce qui va permettre d’interroger dans un sens des nouveaux genres de médias, qui associent une relation entre l’art et le jeu, et/ou le cinéma et le jeu vidéo.

Différents dispositifs techniques sont abordés par les auteurs avec chacun leur point de vue à eux, à savoir par exemple, certaines expériences scientifiques traitent de la relation du corps humain, à savoir le cerveau, le regard, la perception, par rapport à un espace. Certains interrogent des situations immersives avec la cartographie, ou l’espace d’une exposition, le « white cube », avec une mise en abyme d’un espace d’exposition qui se trouve à distance. Mais aussi, le rapport entre l’intelligence humaine et celle de la machine avec les « agents intelligents », qui trouble alors l’identité de l’avatar qui n’est plus alors une simulation mais un dialogue distingué et réfléchi entre un homme et une machine. Enfin, la conscience sonore est explicitée par des expériences sur le passage des flux et des immersions.

Cet ouvrage est très intéressant dans le sens où il parle de choses actuelles qui sont de plus en plus en vogue dans l’art numérique, où on cherche tout simplement à « plonger » le spectateur dans une situation qui brouille alors les frontières entre le réel et le jeu. On peut dire alors que celui-ci n’est plus passif comme avant, où il déambulait dans la galerie, en ne regardant qu’avec ses yeux. L’espace d’exposition a changé pour qu’il reconsidère son espace comme un terrain d’exploration et d’expérimentation. L’implication est telle qu’il devient alors le sujet principal des œuvres interactives qui sont proposées. Les Figures de l’immersion permet alors de mieux comprendre et discerner certaines choses de nos jours : ceci rappelle à l’exposition XYZT, les paysages abstraits, jouer avec la lumière, qui a lieu au Palais de la découverte jusqu’en janvier 2016, et où le spectateur interagit avec un environnement sonore et visuel bien immersif, et qui lui permet d’interroger la sensibilité que peuvent avoir alors certains algorithmes à partir du moment où ils sont mis en avant à travers un dispositif technique et esthétique. Les avancées technologiques permettent alors d’expérimenter toujours plus des nouveaux regards et perceptions de l’humain par rapport à son environnement grâce à la machine.

expoparisExposition XYZT, les paysages abstraits, 2015, Palais de la Découverte (Paris)

Her

014107

Her est un film américain de Spike Jonze, réalisé en 2014, qui narre, dans un futur proche, l’histoire de Theodore Twonbly (Joaquin Phoenix), un trentenaire solitaire qui se remet difficilement de son récent divorce. Désireux de combler la solitude qui lui pèse tant, il décide de se procurer un des nouveaux systèmes informatiques sortis sur le marché qui s’adaptent à la personnalité de son utilisateur : il en vient alors à se lier d’amitié avec son Operating System (OS), prénommé Samantha (Scarlett Johansson).

Lire la suite